Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/324

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prendre pour articuler certaines syllabes, ne permettent pas à ces organes de se replier aisement ainsi qu’il faudroit qu’ils se pliassent pour articuler sans peine les syllabes suivantes. L’on a remarqué depuis long-tems que toute prononciation pénible pour la bouche de celui qui parle, devient pénible pour l’oreille de celui qui l’écoute. Voilà pourquoi nous sommes choquez machinalement par la prononciation d’un homme qui profere avec peine certains mots d’une langue étrangere, et qui est obligé à forcer souvent ses organes pour en arracher des sons qu’ils ne sont point en habitude de former. Notre premier mouvement que la politesse même a peine à reprimer en beaucoup de pays, est de rire de lui et de le contrefaire. Il est clair par les raisons que nous avons exposées, qu’il est bien plus facile aux écrivains latins de faire des alliances agréables entre les sons, de placer tous les mots d’une phrase auprès d’autres mots qui se plaisent dans leur voisinage : en un mot de parvenir à ce que Quintilien appelle inoffensam verborum copulam, qu’il n’est possible aux écrivains françois de le faire. Cette phrase françoise le pere aime son fils,

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