Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/486

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supplée en quelque façon à la vrai-semblance, laquelle manque dans ce spectacle. Il est contre la vrai-semblance, me dira-t-on, que des acteurs parlent toûjours en vers alexandrins, comme ils le font dans nos tragédies ordinaires. J’en tombe d’accord, mais la vrai-semblance est encore bien plus choquée par des acteurs qui traitent leurs passions, leurs querelles et leurs interêts en chantant. Le plaisir que nous fait la musique répare néanmoins ce défaut. Ses expressions rendent aux scénes des opera le pathétique que le manque de vrai-semblance devroit leur ôter. On pleure donc aux scénes touchantes des opera, ainsi qu’aux scénes touchantes des tragédies qui se déclament. Les adieux d’Iphigénie à Clitemnestre, ne firent jamais verser plus de larmes à l’hôtel de Bourgogne, que la reconnoissance d’Iphigenie et d’Oreste en ont fait répandre à l’opera. Despreaux auroit pû dire de l’actrice qui faisoit le personnage d’Iphigenie dans l’opera de Duché il y a vingt et un ans, ce qu’il a dit de l’actrice qui faisoit le personnage dans la tragédie de son ami.