Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/64

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Au milieu l’on voit le monument d’une jeune fille morte à la fleur de son âge : c’est ce qu’on connoît par la statuë de cette fille couchée sur le tombeau à la maniere des anciens. L’inscription sepulcrale n’est que de quatre mots latins : je vivois cependant en Arcadie, et in Arcadia ego. Mais cette inscription si courte fait faire les plus serieuses reflexions à deux jeunes garçons et à deux jeunes filles parées de guirlandes de fleurs, et qui paroissent avoir rencontré ce monument si triste en des lieux où l’on devine bien qu’ils ne cherchoient pas un objet affligeant. Un d’entre eux fait remarquer aux autres cette inscription en la montrant du doigt, et l’on ne voit plus sur leurs visages, à travers l’affliction qui s’en empare, que les restes d’une joïe expirante. On s’imagine entendre les reflexions de ces jeunes personnes sur la mort qui n’épargne ni l’ âge, ni la beauté, et contre laquelle les plus heureux climats n’ont point d’azile. On se figure ce qu’elles vont se dire de touchant lorsqu’elles seront revenuës de la premiere surprise, et l’on l’applique à soi-même et à ceux pour qui l’on s’interesse.

Il en est de la poësie comme de la peinture, et