Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, 1733.djvu/72

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memoire devance les yeux dans cette lecture. Ces deux genres de poësie nous font entendre des hommes touchez, et qui nous rendroient très-sensibles à leurs peines comme à leurs plaisirs, s’ils nous entretenoient eux-mêmes. Les épigrammes, dont le merite consiste en jeux de mots, ou dans une allusion ingenieuse, ne nous plaisent que lorsqu’elles sont nouvelles pour nous. C’est la premiere surprise qui nous frappe. Le trait est émoussé dès que nous en avons retenu le sens : mais les épigrammes qui peignent des objets capables de nous attendrir ou de s’attirer une grande attention en quelque maniere que ce soit, font toujours impression sur nous. On les relit plusieurs fois, et bien des personnes les retiennent sans avoir jamais pensé à les apprendre. Pour ne point mettre en jeu les poëtes modernes, les épigrammes de Martial, qu’on sçait communement, ne sont point celles où il a joüé sur le mot, mais bien les épigrammes où il a dépeint un objet capable de nous interesser beaucoup. Telle est l’épigramme de Martial sur Arria la femme de Pétus. Les auteurs sensez qui ont voulu composer des poëmes dogmatiques, et faire