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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/124

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parlé, nous n’avons pas prétendu marquer l’ âge de trente ans, comme une année fatale, avant laquelle et après laquelle on ne dût rien attendre. Il peut se trouver cinq ou six années de difference, dans l’ âge auquel deux grands peintres ou deux grands poëtes seront parvenus à leur perfection. L’un y peut être arrivé à vingt-huit ans et l’autre à trente-trois. Racine fut formé dès vingt-huit ans. La Fontaine étoit bien plus âgé quand il fit les premiers de ses excellens ouvrages. Le genre de poësie auquel s’applique un artisan paroît même retarder encore cette année heureuse. Moliere avoit quarante ans, lorsqu’il fit les premieres de ces comédies, dignes d’être comptées au nombre des pieces qui lui ont acquis sa réputation. Mais il ne suffisoit pas à Moliere d’être grand poëte pour être capable de les composer : il falloit encore qu’il eût acquis une connoissance des hommes et du monde, qu’on n’a pas de si bonne heure, et sans laquelle le meilleur poëte ne sçauroit faire que des comedies médiocres. Le poëte tragique doit atteindre le dégré de perfection où il est capable de monter, de meilleure heure que le poëte comique, le génie et une connoissance generale