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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/392

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mieux le repeter, que de redire le sentiment de gens qui n’ont pas mis l’enseigne de la profession à laquelle l’ouvrage ressortit. En ces sortes de choses où les hommes ne croïent point avoir un intérêt essentiel à choisir le bon parti, ils se laissent ébloüir par une raison qui peut beaucoup sur eux. C’est que les gens du métier doivent avoir plus d’expérience que les autres. Je dis ébloüir, car comme je l’ai exposé, la plûpart des peintres et des poëtes ne jugent point par voïe de sentiment, ni en déferant au goût naturel perfectionné par les comparaisons et par l’expérience, mais par voïe d’analyse. Ils ne jugent pas en hommes doüez de ce sixiéme sens dont nous avons parlé, mais en philosophes spéculatifs. La vanité contribuë encore à nous faire épouser l’avis des gens du métier, préferablement à l’avis des hommes de goût et de sentiment. Suivre l’avis d’un homme qui n’a pas d’autre expérience que nous et qui n’a rien appris que nous ne sçachions nous-mêmes, c’est reconnoître en quelque façon qu’il a plus d’esprit que nous. C’est rendre une espece d’hommage à son discernement naturel. Mais croire l’artisan, déferer à l’avis d’un homme qui a