Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/396

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point pour cela les juges uniques du mérite de ce tableau. Comme les plus grands ouvriers en ont fait quelquefois de médiocres, on ne connoît pas l’excellence d’un tableau dès qu’on connoît son auteur. Il n’est pas décidé qu’un tableau soit de la premiere classe, parce qu’il est décidé qu’il est l’ouvrage d’un peintre des plus illustres. Quoique l’expérience nous enseigne que l’art de deviner l’auteur d’un tableau en reconnoissant la main du maître, soit le plus fautif de tous les arts après la médecine, il prévient trop néanmoins le public en faveur des décisions de ceux qui l’exercent, même quand elles sont faites sur d’autres points. Les hommes qui admirent plus volontiers qu’ils n’approuvent, écoutent avec soumission, et ils repetent avec confiance tous les jugemens d’une personne qui montre une connoissance distincte de plusieurs choses où ils n’entendent rien. On verra d’ailleurs par ceque je vais dire concernant l’infaillibilité de l’art de discerner la main des grands maîtres, quelles bornes on doit donner à la prévention qui nous est naturelle en faveur de tous les jugemens rendus par ceux qui font profession de