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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/442

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Un augure favorable pour un de ces ouvrages, c’est que sa réputation croisse d’année en année. C’est ce qui arrive toujours quand son artisan n’a point de successeur, et encore plus lorsqu’il est mort depuis long-temps sans avoir été remplacé. Rien ne montre mieux qu’il n’étoit pas un homme du commun dans la carriere qu’il a courue, que l’inutilité des efforts de ceux qui osent entreprendre de l’atteindre. Ainsi les soixante ans qui se sont écoulez depuis la mort de Moliere, sans que personne l’ait remplacé, donnent un lustre à sa réputation qu’elle ne pouvoit pas avoir un an après sa mort. Le public n’a point mis dans la classe de Moliere les meilleurs des poetes comiques qui ont travaillé depuis sa mort. Il n’a point fait cet honneur à Renard, à Boursault ni aux deux auteurs du grondeur, non plus qu’à quelques poetes comédiens, dont les pieces l’ont diverti quand elles ont été bien représentées. Ceux mêmes de nos poetes qui sont gascons, ne s’égalerent jamais sérieusement à Moliere. Chaque année qui se passera sans donner un successeur au Terence françois, ajoutera encore quelque chose à sa réputation.