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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/529

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que nous sommes la premiere generation d’hommes raisonnables que la terre ait encore portée. Mais, dira-t-on, des traductions faites par des écrivains sçavans et habiles, ne mettent-elles point, par exemple, ceux qui n’entendent pas le latin en état de juger par eux-mêmes, en état de juger par voïe de sentiment de l’éneïde de Virgile ? Je tombe d’accord que l’éneïde de Virgile en françois, tombe, pour ainsi dire, sous le même sens qui auroit jugé du poëme original, mais l’éneïde en françois n’est plus le même poëme que l’éneïde en latin. Une grande partie du mérite d’un poëme grec ou latin, consiste dans le rithme et dans l’harmonie des vers, et ces beautez très-sensibles dans les originaux ne sçauroient être, pour ainsi dire, transplantées dans une traduction françoise. Virgile lui-même ne pourroit pas les y transplanter, d’autant que notre langue n’est pas susceptible de ces beautez, autant que la langue latine, comme nous l’avons exposé dans la premiere partie de cet ouvrage. En second lieu la poësie du stile dont nous avons encore parlé fort au long dans cette premiere