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Page:Dubos - Réflexions critiques sur la poésie et sur la peinture, Tome 2,1733.djvu/566

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lecture. On continuera de les lire et de les admirer, à moins que les poëtes à venir ne produisent quelque chose de meilleur. Ce ne furent point des critiques géometriques qui dégoûterent nos ayeux des poësies de Ronsard, et qui leur en firent abandonner la lecture, mais bien des poesies plus interessantes que celles de Ronsard. Ce sont les comédies de Moliere qui nous ont dégoûtez de celles de Scarron et des autres poëtes qui l’avoient précedé, mais non des livres écrits pour mettre en évidence les défauts de ces pieces. Lorsqu’il paroît des poësies meilleures que celles qui peuvent être déja entre les mains du public, il n’est pas necessaire que les critiques le viennent avertir de quitter le bon pour prendre le meilleur. Le monde n’a pas besoin d’être éclairé sur le mérite de deux poëmes, comme sur le mérite de deux systêmes de philosophie. Il fait le discernement et il juge des poëmes à l’aide du sentiment bien mieux que les critiques ne le peuvent faire avec leurs regles. Qu’on fasse donc un poëme meilleur que l’éneïde, si l’on veut diminuer l’admiration que les hommes ont pour cet ouvrage, et si l’on prétend lui enlever ses