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D’UN EXILÉ

nous serions sujets à cinquante coups de fouet, et qu’il nous était défendu, sous peine de punition sévère, de parcourir l’intérieur de l’établissement sans permission, que pour négligence de nos travaux, nous serions aussi puni du fouet ; pour désobéissance ou manque de respect à nos supérieurs ou encore pour diverses autres infractions de peu de conséquence, nous serions punis avec rigueur. Si le lecteur arrête un instant son attention sur les termes de cette harangue, et s’il considère surtout la véhémence arrogante avec laquelle elle fut prononcée, il se fera une idée de la perspective que nous offrait notre avenir. Le soir vers cinq heures, nous fûmes tous appelés et après avoir été contés, nous fûmes conduits dans des espèces de prison et là renfermés sous clef jusqu’au lendemain. Nous avions à nous coucher de bonne heure et sur nos canapés qui n’avaient plus que la couverture. Le silence durant la veillée comme pendant la nuit était de rigueur. Le matin à six heures on nous ouvrit les portes et nous sortîmes pour aller prendre notre déjeuné. Il consistait en un potage épais fait avec une demie livre de farine de maîs ou blé d’Inde et d’une once de sucre. Le midi nous avions une livre de pain faite avec la dernière qualité de farine, et une livre de viande, soit bœuf ou mouton et voilà tout ; excepté pourtant les charretiers, les mécaniciens et les conducteurs qui recevaient une petite addition de thé et de sucre. Jamais nous n’avions rien pour souper. Après avoir travaillé tout le jour, on nous renfermait épuisés de