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qualifié « Reconnoissance et obligation. » Dans l’intention de Jean-Jacques, il pouvait tenir lieu, en quelque manière, d’une disposition testamentaire ; même il imitait, dans sa clause la plus importante, le procédé auquel avait eu recours, en 1737, le notaire de Chambéry et consistant à affirmer l’existence d’une dette dont la régularité paraissait contestable. Était-ce simplement une expédition de cette pièce, ou bien un véritable testament, olographe, qu’il confia à M. de Luxembourg, avec d’autres papiers[1], au moment de quitter Montmorency, le 9 juin 1762 ? Nous l’ignorons, et nous voyons seulement qu’un mois après la mort du maréchal, survenue le 18 mai 1764, La Roche, le valet de chambre et « l’homme de confiance » de Mme de Luxembourg, répondant à une réclamation de Rousseau, lui annonçait que le pli scellé s’était « trouvé dans un cabinet qui n’avoit pas encore été inventorié. Pour la formalité, en présence de M. le prince de Tingry, [de] Madame la maréchale et des gens de justice, l’on a ouvert l’enveloppe, sans en ôter le testament, et, recacheté des armes de Madame la maréchale, il m’a été remis tout de suite. » Et La Roche sollicite à ce sujet les ordres de son correspondant[2].

Si ce deuxième testament était distinct de l’obligation notariée du 8 mars 1758, on doit admettre qu’après l’avoir reçu à Môtiers, Jean-Jacques le détruisit, par le motif que, entre temps, il en avait fait un troisième, celui que je publie aujourd’hui et dont aucun biographe, jusqu’ici, n’avait eu connaissance.


Dès le mois de décembre 1762, le philosophe proscrit communiquait à Milord Maréchal son intention de laisser son modeste avoir à sa gouvernante ; il lui confiait également ses préoccupations au sujet des revendications possibles de ses parents de Genève et d’une formalité qu’il appréhendait, celle de l’apposition

  1. « Cartons et paquets de papiers numérotés. » (Lettre du maréchal, 23 juin 1762 ; G. Streckeisen, J.-J. Rousseau, ses amis et ses ennemis, t. I, p. 479).
  2. Lettre du 22 juin 1764 (Ibid., p. 503). — Le 11 juin, il lui avait écrit (p. 502) : « L’on n’a pas encore trouvé le testament ; j’espère qu’il se trouvera : il y a encore quelque[s] endroit[s] où l’on n’a pas fait de recherches. »