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VERS LES SOMMETS

— Il me semble que vous exagérez ma valeur, dit Jules. Bien que je me croie un peu préparé à un rôle de législateur, il y a si loin d’un savoir platonique à la mise en œuvre de conceptions transcendantes.

Tout le monde s’était rassis. M. Clément crut bon de faire quelques réflexions. Parce qu’il ne fut pas long, on le trouva tout à fait intéressant. Mais deux amoureux ont hâte de se trouver seule à seul. Les affaires de cœur se traitent en cabinet noir.

— Je n’ai pas fait de politique active, dit le vieillard, mais de loin la politique m’a toujours fasciné. J’ai connu assez intimement les hommes qui en font et en vivent. C’est sur un navire qui tient mal une mer en furie que vous vous embarquez. Excusez mes expressions de marin. La politique est une marâtre, qui étrangle souvent ses propres enfants. Je ne tiens pas ce langage pour vous décourager. Je vous l’ai dit, je suis fier du parti que vous avez pris. Ce n’est que pour vous avertir. Un homme averti en vaut deux. Vous, vous en valez dix, vous en valez cent. Du reste, l’avocat est l’homme de profession libérale qui réussit généralement le mieux en politique. C’est lui qui risque le moins en cette carrière. Puis pour quelques-uns