Page:Duhamel - La Vie des martyrs.djvu/174

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— Jamais je n’oserai montrer cela, dit-il, c’est considérablement exagéré.

Il me tend le papier où il est dit, en substance, que le caporal Léglise s’est vaillamment comporté, sous une pluie de bombes, et qu’il a été amputé de la cuisse gauche.

— Je ne me suis pas vaillamment comporté, discute-t-il : j’étais à mon poste, voilà tout. Quant aux bombes, je n’en ai reçu qu’une.

Je ne peux pas accepter cette manière de voir.

— N’est-ce donc pas une vaillante attitude que d’être à ton poste avancé, si près de l’ennemi, tout seul en tête de tous les Français ? N’étaient-ils pas tous derrière toi, jusqu’au bout du pays, jusqu’aux Pyrénées ? Ne s’en remettaient-ils pas tous avec confiance à ton sang-froid, à ton coup d’œil, à ta vigilance ? Tu n’as reçu qu’une bombe, mais je ne pense pas que tu eusses pu en recevoir plusieurs, et être encore des nôtres. D’ailleurs, la citation, loin d’exagérer, est au contraire en déficit ; elle dit que tu as donné une jambe et c’est les deux jambes que tu as données ! Il me semble que cela compense largement ce qu’il pourrait y avoir d’excessif quant aux bombes…