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NUITS EN ARTOIS


I


Un coup d’œil encore à la salle sombre, où s’épaissit désormais quelque chose qui n’est pas le sommeil, mais qui est seulement l’accablement nocturne.

Le billard a été poussé dans un coin ; il porte un fardeau incohérent de linge, de fioles et de meubles. Une odeur de soupe et d’excréments circule entre les brancards et fait injure aux sveltes vases d’onyx juchés sur le médaillier.

Et maintenant, vite, vite ! Sur la pointe des pieds, gagnons le dehors.

La nuit est limpide, froide, sans un souffle : un seul bloc de glace transparente entre la neige et les étoiles. Suffira-t-elle à laver cette gorge soulevée par la tiède odeur du pus bleu ?