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LA PHYSIQUE PARISIENNE AU XIVe SIÈCLE

de même, le ciel a été créé dans le pur néant ; et le pur néant était autrefois là où ce corps se trouve maintenant ; et tout cela doit être compris au sens purement négatif, de la manière que nous avons exposée. »

Ce corps nouvellement créé par Dieu confinerait donc, d’un côté, au vide, èt, de l’autre côté, au néant. De même, « si les éléments qui se trouvent contenus par le ciel étaient anéantis, nous devrions admettre que le vide existe en la concavité du ciel ; mais nous ne devrions en aucune façon l’admettre hors du ciel ; là, il n’y aurait que le pur néant. »

Les corollaires mêmes qu’Henri de Gand déduit si clairement de sa théorie sont la condamnation de cette théorie. Ce corps, créé hors du ciel ultime, est dans le vide du côté qui regarde le ciel suprême et dans le néant de l’autre côté ; comment marquera-t-on, à la surface de ce corps, la frontière entre l’aire qui confine au vide et l’aire qui ne touche que le néant ?

L’effort tenté par Henri de Gand pour attribuer à Dieu le pouvoir de créer un corps nouveau hors du Monde, et pour accorder au Philosophe qu’il n’y a, hors du Monde, ni plein ni vide, était d’avance condamné à l’insuccès ; la première affirmation entraînait la ruine de la seconde.


C. Richard de Middleton


La doctrine de Richard de Middleton est, en général, un reflet de l’enseignement d’Henri de Gand ; au sujet de la possibilité du vide, ce reflet est tellement affaibli qu’il semble sur le point de disparaître ; la lecture de ce qu’a écrit le Franciscain Anglais ne sera pas, cependant, dénuée de tout en intérêt ; elle nous montrera quel rôle décisif les condamnations portées contre les « articles de Paris » jouaient dans les discussions qui nous occupent.

Richard accorde[1] que Dieu aurait pu créer un autre monde.

1. Clarissimi theologi Magistri Rigardi de Media Villa seraphici ord. min. couvent, super quatuor libros sententiarum Pétri Lombardi quæstiones subiilissimæ. Brixiæ, MDXCI, tomus primus, p. 392. Lib. I, dist. XL IV, art. I, quæst. IV : Utrum Deus posset facere aliud universum. — En une de ses questions quodlibétiques, Richard traite de nouveau de la pluralité des mondes, mais il n’y fait aucune allusion à la possibilité du vide (Quodtibeta doctoris eximii Rïcardi de Media Villa ordinis minorum, quæstiones octuaginta continentia. Brixiæ, MDXCI. Quodlib. II, art. II, quæst. I : Utrum plures mundos esse simul includat contradictionem ; p. 49.

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