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LE VIDE ET LE MOUVEMENT DANS LE VIDE

entre ces surfaces sphériques, c’est donc qu’elles se touchent soit en un seul point, soit tout le long d’une étendue divisible. Elles ne sauraient se toucher seulement en un point ; alors, en effet, entre un point de la première sphère et un point de la seconde, il y aurait quelque chose de divisible qui ne pourrait être que le vide ; d’où la conclusion. Dira-t-on qu’elles se touchent tout le long d’une aire divisible ? Cela ne saurait être ; un corps sphérique ne saurait toucher un autre corps sphérique tout le long d’une aire divisible ; si une surface touche une surface convexe tout le long d’une aire divisible, c’est que cette première surface est concave dans la région où le contact a lieu ; or il est impossible que la surface sphérique qui termine un monde soit concave. On voit donc que les théologiens de notre religion sont tenus d’admettre le vide. Nous avons traité plus longuement de cette question au premier livre Du ciel[1]. »

Contraint, par sa foi, d’admettre la possibilité du vide, Burley examine[2] comment ce vide pourrait être.

On peut, dit-il, entendre par vide « un espace apte à recevoir un corps naturel et, cependant, privé de la présence d’un tel corps naturel. Mais cela se peut entendre de deux manières. En un premier sens, il n’y a, en cet espace, ni corps naturel ni dimensions séparées. En un second sens, il y a, en cet espace, des dimensions séparées.

» Le premier sens implique contradiction ; supposer quelque chose qui est capable de recevoir un corps mais qui n’a aucun volume, c’est admettre un volume sans volume, car il n’y a qu’un volume qui soit apte à recevoir un volume.

» Le second sens, celui qui regarde le vide comme un certain volume ayant longueur et largeur et profondeur mais séparé de tout volume sensible, ce sens-là est moins impossible. Selon les théologiens, en effet, cela est possible à Dieu ; de même qu’au sacrement de l’autel, il reste un volume sans qu’aucune substance corporelle en soit le support, de même, Dieu pourrait faire qu’un volume existât sans aucune qualité. Un semblable

1. On voit que Walter Burley avait composé des commentaires sur le De Cœlo et Mundo. Nous n’avons pu trouver aucun indice de l’existence actuelle sous forme imprimée, de ces commentaires. Mais ils sont conservés, sous forme manuscrite, ainsi que les commentaires sur les Météores du même auteur, à la Bibliothèque de l’Université d’Oxford. Cf. Houzeau et Lancaster, Bibliographie générale de l’Astronomie, t. I, nos  1741 et 1742.

2. Burlei Op. laud., lib. IV, tract. II, cap. IV ; éd. cit., fcl. qui précède immédiatement le fol. sign. o, col. c.

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