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L’UNIVERSITÉ DE PARIS AU XVe SIÈCLE

toits et des murailles ; il n’y avait plus de bibliothèque et le nombre des écoliers était fort réduit. »

« On pourrait[1] faire la même observation pour d’autres collèges réguliers ou séculiers. Avant 1417, Jean Courtecuisse s’écrie dans un discours : « Quantes collèges sont deffondés ! » Pour peindre le lamentable état où l’Université se trouvait en 1416, Du Boulay écrit[2] : « Depopulatum et pene exhaustum studium. »

L’année 1417 vit renaître l’unité dans l’Église ; mais ni à la Ville de Paris ni à son Université, elle ne rendit, tant s’en faut, la paix et la sécurité.

À la fin de l’année 1407, Louis d’Orléans avait été assassiné par ordre de Jean sans Peur, duc de Bourgogne.

Le 8 mars 1408, en l’hôtel de Saint-Paul, devant le Dauphin, les princes, un grand nombre de seigneurs, plusieurs prélats, le recteur et les députés de l’Université, Maître Jean Petit, de Hesdin, docteur en Théologie, prononça un discours qu’il concluait en ces termes[3].

« Mondict seigneur de Bourgogne ne veult et ne doit en riens estre blasmé ne reprins dudict cas advenu en la personne dudict criminel duc d’Orléans. Et que le Roy nostre sire ne doit pas tant seulement estre content, mais doit avoir mondict seigneur de Bourgongne en son faict pour agréable et le auctorizer en tant que mestier seroit. Et avec ce le doit guerdonner et rémunérer en trois choses, c’est assavoir en amour, en honneur et en richesses, à l’exemple des rémunérations qui furent faictes à monseigneur sainct Michel l’Ange et au vaillant homme Phinées. »

On écouta en silence cette impudente apologie de l’assassinat ; Jean sans Peur était là ; la moindre protestation eût été chèrement payée. Jean Petit put mourir à Hesdin, en 1411, avant que n’eût éclaté la réprobation contre son langage indigne. Mais en août 1413, le Duc de Bourgogne quitta Paris ; les partisans du feu duc d’Orléans, sous la conduite du comte d’Armagnac, y entrèrent triomphants ; les honnêtes gens de l’Université purent enfin faire connaître leur sentiment. Jean Charlier, de Gerson, chancelier de Notre-Dame et curé de Saint-Jean-

  1. H. Denifle, La désolation…, t. II, p. 732.
  2. Bulæi Historia Universitatis Parisiensis, t. V, p. 332.
  3. P. Féret, La Faculté de Théologie de Paris et les Docteurs les plus célèbres. Moyen-Âge, tome IV, Paris 1897, p. 89.