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L’UNIVERSITÉ DE PARIS AU XVe SIÈCLE

» L’une est celle qui prête son ministère aux sciences naturelles et purement spéculatives ; c’est celle qu’il est d’usage, et, pour ainsi dire, par antonomase, d’appeler Logique ; selon la définition qu’en donne Pierre Hispanus, elle tient la voix qui conduit aux principes de toutes les méthodes ; certains la nomment Logique verbale (sermocinalis).

» L’autre est la Logique que l’on nomme proprement rhétorique ; celle-ci sert surtout et prête son concours aux sciences morales et politiques ; elle concerne particulièrement l’intelligence pratique.

» Chacune de ces deux Logiques parle suivant ses règles propres ; en outre, elle a ses moyens particuliers de nous instruire, de nous former, de nous apprendre à discerner le vrai d’avèc le faux.

» La première Logique considère surtout le sens propre des termes ; elle rejette toute métaphore et toute signification figurée ; elle se propose d’expliquer l’adéquation de l’objet réel’et de la connaissance que nous en avons ; à l’aide des règles des suppositions, des ampliations et des appellations, elle s’efforce d’apprécier avec la plus stricte précision la force de chaque mot et de chaque proposition. Cette Logique bannit loin d’elle et repousse presque toute expression figurée, tout ornement du discours ; son langage correspond d’aussi près et aussi brièvement que possible à nos concepts intérieurs afin que, par lui, dans les sciences spéculatives, la vérité nous apparaisse plus claire et plus précieuse.

» Au contraire, la Rhétorique, que nous appelons l’autre Logique, use volontiers de figures et de tropes ; elle use de couleurs et de fleurs qui ne sont point nécessaires, mais qui sont telles ; la plupart du temps, d’ailleurs, elle condescend au langage communément employé…

» Aux sciences morales, cette dernière Logique est nécessaire. La première, en effet, ne suffit pas à engendrer, à exciter les mouvements du cœur, s’ils sont bons, à les faire taire, à les apaiser s’ils sont mauvais. Cette première Logique recherche uniquement la vérité dans les phoses, en tant que cette vérité est une adéquation entre l’objet connu et l’intelligence spéculative. La seconde, au contraire, la recherche en tant qu’elle est une adéquation avec le cœur ou intelligence pratique..

» Lors donc qu’on s’enquiert de la vérité d’une proposition