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L’HEURE DU VAGUEMESTRE

internés et des autorités. Il y eut seulement une courte période d’un régime plus sévère lors du passage d’un censeur temporaire dont les scrupules allaient jusqu’à nous faire ouvrir les boites de conserves avant de nous les remettre. Ce qui nous obligeait à consommer immédiatement ces envois, à rebours du principe de la conserve, qui est de se… conserver, ou à les mettre en dépôt, d’où on ne pouvait les retirer qu’après de multiples formalités. Mais, je le répète, cela dura fort peu de temps.

J’ai dit que l’alcool était interdit et que cela se comprenait. Mais Gœthe pensait : Ein Mädchen un ein Gläshen Wein. C’est-à-dire : une femme et un verre de vin soulagent tous les besoins… et celui qui ne boit ni n’embrasse est pire qu’un mort… On verra un aspect du problème soulevé ici dans un des chapitres suivants. Quant aux « verres de vin », disons qu’à plusieurs reprises on a essayé, non sans succès, d’enfreindre la « loi de prohibition » imposée à notre petite ville. On sait qu’à la cantine on a vendu de la bière durant un an environ. Il n’y eut pas d’excès à signaler. Les « cas d’ivresse » furent absolument insignifiants. D’autre part, on a tenté de fabriquer… ne disons pas du vin, mais une boisson au goût alcoolisé par la fermentation de raisin sec et d’autres fruits. On buvait un petit verre de ce « composé » et on avait l’air d’avoir dégusté un nectar. Seulement, le premier jour où l’on fit l’essai pour de bon de cette nouvelle liqueur, en distribuant un gallon entier dans la baraque no 1 habitée par les Allemands, trois