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LA VILLE SANS FEMMES

Leur vie est réglée comme du papier à musique. Il y en a, parmi eux, qui vont travailler dans la forêt pendant une partie de la journée. D’autres s’occupent de la cuisine ou de l’administration du camp. L’après-midi ou le soir, presque tous suivent des cours. Ils étudient très sérieusement les mathématiques, l’algèbre, la technologie, les sciences, les langues étrangères. Plusieurs d’entre eux sont de mes élèves et je dois rendre hommage à la bonne volonté qu’ils montrent à apprendre et à l’ardeur qu’ils manifestent dans leur travail. Remarque générale : ces marins possèdent tous une instruction assez étendue et on sent chez eux la préoccupation d’augmenter le plus possible leur bagage intellectuel et culturel.

Un autre groupe de marins se compose de seize Hongrois qui naviguaient à bord d’un vieux bateau appartenant à une compagnie de Budapest dont le siège était à Londres. Le bateau, une vieille carcasse qui tenait la mer plutôt par vitesse acquise que par vertu propre, venait d’arriver dans un port canadien. L’équipage profita-t-il de cette escale pour mettre en scène une menace de grève afin de se soustraire aux dangers de torpillage ou bien a-t-il réellement fait une demande d’augmentation de salaires justifiée par l’insuffisance de leur rémunération ? Je n’en sais rien. Toujours est-il qu’ayant refusé de repartir, les seize marins hongrois furent, selon les dispositions formelles de la loi, internés et amenés ici. Pour comprendre le caractère des Hongrois, il faut connaître leur pays.

La Hongrie est un pays riche en blé, en vins capiteux, comme le tokay, et en femmes jolies et attachantes.