Page:Dumas - Œuvres - 1838, vol.2.djvu/375

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MARGUERITE.

C’est la vérité.

BURIDAN.

Le premier acte de mon pouvoir sera de faire donner la question à un certain Orsini, qui était à la cour du duc Robert II.

ORSINI.

Et pourquoi, monseigneur, pourquoi ?

BURIDAN.

Pour savoir de lui comment il a accompli les ordres qu’il a reçus de sa souveraine Marguerite de Bourgogne, relativement à deux enfants.

ORSINI.

Oh ! pardon, monseigneur, pardon de ne les avoir pas fait mourir, comme on me l’avait ordonné.

MARGUERITE.

Ce n’était pas moi qui avais donné cet ordre… c’était…

BURIDAN.

Tais-toi, Marguerite.

ORSINI.

Pardon si je n’en ai pas eu le courage ; c’étaient deux fils si faibles et si beaux !

BURIDAN.

Qu’en as-tu fait, malheureux ?

ORSINI.

Je les ai donnés pour les exposer à un de mes hommes ; et j’ai dit qu’ils étaient morts.

BURIDAN.

Et cet homme ?

ORSINI.

C’est un des guichetiers de cette prison ; on le nomme Landry ! Pardon.

BURIDAN.

C’est bien, Orsini ; voilà un trait qui te fait honneur ! une idée qui t’est venue à toi et qui n’est pas venue à une mère : qu’on n’avait pas besoin de tuer ses enfants lorsqu’on pouvait les exposer. Orsini, eusses-tu commis bien des crimes, voilà une action qui les rachète ; il te reste donc un cœur ! il te reste donc une âme ! embrasse-moi, Orsini ! embrasse-moi ! Oh ! tu auras de l’or ce que pesaient ces enfants ; deux garçons, n’est-ce pas ? oh ! mes enfants ! mes enfants ! Ah ! assez, assez, tu vois bien que la reine me prend en pitié.

ORSINI.

Que me reste-t-il à faire, monseigneur ?

BURIDAN.

Prends cette lampe, et éclaire le chemin… Prenez mon bras, madame.

MARGUERITE.

Où allons-nous ?

BURIDAN.

Au-devant du roi Louis X, qui rentre demain dans sa bonne ville de Paris.