Page:Dumas - Ange Pitou, 1880.djvu/113

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armes des gardes, il les donnera. — À l’hôtel de ville ! répéta une fraction des assistants.

Et tout le monde s’écoula dans les trois directions qui avaient été signalées.

Pendant ce temps, les dragons s’étaient ralliés autour du baron de Bezenval et du prince de Lambesc sur la place Louis XV.

C’est ce qu’ignoraient Billot et Pitou, lesquels n’avaient suivi aucune des trois troupes, et qui se trouvaient à peu près seuls sur la place du Palais-Royal.

— Eh bien ! cher monsieur Billot, où allons-nous, s’il vous plaît ? demanda Pitou. — Eh ! dit Billot, j’aurais bien envie de suivre ces braves gens. Non pas chez les armuriers, puisque j’ai une si belle carabine, mais à l’hôtel de ville ou aux Invalides. Cependant, étant venu à Paris, non pas pour me battre, mais pour savoir l’adresse de monsieur Gilbert, il me semble que je devais aller au collége Louis-le-Grand, où est son fils ; quitte après cela, quand j’aurai vu le docteur, à me rejeter dans tout le tohu-bohu.

Et les yeux du fermier lancèrent des éclairs.

— Aller d’abord au collége Louis-le-Grand me paraît chose logique, dit sentencieusement Pitou, puisque nous sommes venus à Paris pour cela. — Prends donc un fusil, un sabre, une arme quelconque à l’un de ces fainéants qui sont couchés là-bas, dit Billot, en montrant un des cinq ou six dragons étendus à terre, et allons au collège Louis-le-Grand. — Mais ces armes, dit Pitou en hésitant, elles ne sont point à moi. — À qui donc sont-elles ? demanda Billot. — Elles sont au roi. — Elles sont au peuple, dit Billot.

Et Pitou, fort de l’approbation du fermier, qu’il connaissait pour un homme qui n’eût pas voulu faire tort à son voisin d’un grain de millet, Pitou s’approcha avec toutes sortes de précautions du dragon qui se trouvait être le plus près de lui ; et, après s’être assuré qu’il était bien mort, il lui prit son sabre, son mousqueton et sa giberne.

Pitou avait bien envie de lui prendre son casque, seulement il n’était pas sûr que ce que le père Billot avait dit des armes offensives s’étendît jusqu’aux armes défensives.

Mais, tout en s’armant, Pitou tendit l’oreille vers la place Vendôme.

— Oh ! oh ! dit-il, il me semble que voilà royal-allemand qui revient. En effet, on entendait le bruit d’une troupe de cavaliers qui revenait au pas. Pitou se pencha à l’angle du café de la Régence, et aperçut en effet, à la hauteur du marché Saint-Honoré, une patrouille de dragons qui s’avançait le mousqueton sur la cuisse.

— Eh ! vite, vite, dit Pitou, les voilà qui reviennent.