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ou aurons cessé de vivre. Va donc, et compte sur Gonchon comme il compte sur Billot.

Billot fut convaincu et marcha vers l’entrée de la Bastille, tandis que son interlocuteur s’enfonçait dans le faubourg, aux cris mille fois répétés de : Vive Gonchon ! vive le Mirabeau du peuple !

— Je ne sais comment est le Mirabeau des nobles, dit Pitou au père Billot, mais je trouve le nôtre bien laid.


XVI

LA BASTILLE ET SON GOUVERNEUR


Nous ne décrivons pas la Bastille ; ce serait chose inutile.

Elle vit comme une éternelle image à la fois dans la mémoire des vieillards et des enfants.

Nous nous contenterons de rappeler que, vue du côté du boulevard, elle présentait à la place de la Bastille deux tours jumelles, tandis que les deux faces couraient parallèles aux deux rives du canal d’aujourd’hui.

L’entrée de la Bastille était défendue par un corps de garde d’abord, puis par deux lignes de sentinelles, puis par deux ponts-levis.

Après avoir traversé les différents obstacles, on arrivait à la cour du Gouvernement, logis du gouverneur.

De cette cour, une galerie conduisait aux fossés de la Bastille.

À cette autre entrée, donnant encore sur les fossés, se trouvait un pont-levis, un corps de garde et une barrière de fer.

À la première entrée on veut arrêter Billot ; mais Billot montre son laissez-passer de Flesselles, et on laisse passer Billot.

Billot s’aperçoit alors que Pitou le suit. Pitou n’avait pas d’initiative, mais, sur les pas du fermier, il fût descendu en enfer ou eût monté dans la lune.

— Reste dehors, dit Billot ; si je ne sors pas, il est bon qu’il y ait quelqu’un qui rappelle au peuple que je suis entré. — C’est juste, dit Pitou ; au bout de combien de temps faudra-t-il lui rappeler cela ? — Au bout d’une heure. — Et la cassette ? demanda Pitou. — C’est juste. Eh bien ! si je ne sors pas, si Gonchon ne prend pas la Bastille, ou enfin si, après l’avoir prise, on ne me retrouve pas, il y a à dire au docteur Gilbert, qu’on retrouvera peut-être, lui ! que des hommes venus de Paris m’ont enlevé la cassette qu’il m’avait confiée il y a cinq ans ; que je suis