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LA REINE MARGOT.

reconnu tout à fait. Eh bien ! de Mouy, vous n’êtes donc pas content du roi de Navarre ?

— Monseigneur !

— Allons, voyons ! parlez-moi hardiment. Sans que vous vous en doutiez, peut-être suis-je de vos amis.

— Vous, Monseigneur ?

— Oui, moi. Parlez donc.

— Je ne sais que dire à Votre Altesse, Monseigneur. Les choses dont j’avais à entretenir le roi de Navarre touchent à des intérêts que Votre Altesse ne saurait comprendre. D’ailleurs, ajouta de Mouy d’un air qu’il tâcha de rendre indifférent, il s’agissait de bagatelles.

— De bagatelles ? fit le duc.

— Oui, Monseigneur.

— De bagatelles pour lesquelles vous avez cru devoir exposer votre vie en revenant au Louvre, où, vous le savez, votre tête vaut son pesant d’or. Car on n’ignore point que vous êtes, avec le roi de Navarre et le prince de Condé, un des principaux chefs des huguenots.

— Si vous croyez cela, Monseigneur, agissez envers moi comme doit le faire le frère du roi Charles et le fils de la reine Catherine.

— Pourquoi voulez-vous que j’agisse ainsi, quand je vous ai dit que j’étais de vos amis ? Dites-moi donc la vérité.

— Monseigneur, dit de Mouy, je vous jure…

— Ne jurez pas, Monsieur ; la religion réformée défend de faire des serments, et surtout de faux serments.

De Mouy fronça le sourcil.

— Je vous dis que je sais tout, reprit le duc.

De Mouy continua de se taire.

— Vous en doutez ? reprit le prince avec une affectueuse insistance. Eh bien, mon cher de Mouy, il faut vous convaincre. Voyons, vous allez juger si je me trompe. Avez-vous ou non proposé à mon beau-frère Henri, là, tout à l’heure, le duc étendit la main dans la direction de la chambre du Béarnais, votre secours et celui des vôtres pour le réinstaller dans sa royauté de Navarre ?

De Mouy regarda le duc d’un air effaré.

— Propositions qu’il a refusées avec terreur !

De Mouy demeura stupéfait.

— Avez-vous alors invoqué votre ancienne amitié, le sou-