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ALBERT LE GRAND.

dont on serait tenté de croire que c’est tout simplement quelque machine à calculer, personnifiée par l’exagération populaire.

Bien mieux, Albert le Grand avait invité à dîner un certain comte de Hollande. Pour recevoir dignement ce haut personnage, il fait dresser la table au milieu du jardin, ce qui, naturellement, étonne beaucoup le comte et les seigneurs qui l’accompagnaient : car on était en plein hiver, et plusieurs pieds de neige couvraient le sol du jardin. Mais, au moment de se mettre à table, la neige disparaît, une douce chaleur succède aux rigueurs de la froidure, les arbres se parent de leur feuillage et de leurs fleurs, et les oiseaux joyeux font entendre à l’envi leurs chants du printemps. Cette scène se continue aussi longtemps que dure le repas ; mais, à l’instant où le dîner se termine, tout l’enchantement s’évanouit, et l’hiver reparaît avec ses glaces et son aridité.

Vous voyez quelle idée on se formait alors des hommes qui se livraient à l’étude de la Chimie. Eux-mêmes ne contribuaient pas peu à l’entretenir : ils aimaient, en général, à se donner comme disposant d’une puissance bien supérieure à leurs forces. C’est ainsi qu’on les voit souvent se vanter de savoir faire de l’or, et d’en faire en telle quantité qu’ils veulent, ou du moins de connaître des gens qui en