Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/19

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l’impulsion de sa volonté à tous ces fils réunis ou divergents.

Cette fois il était question d’une grande affaire : il s’agissait d’un bâtiment chargé de tapis turcs, d’étoffes du Levant et de cachemires ; il fallait trouver un terrain neutre où l’échange pût se faire ; puis tenter de jeter ces objets sur les côtes de France.

La prime était énorme si l’on réussissait : il s’agissait de cinquante à soixante piastres par homme.

Le patron de la Jeune-Amélie proposa comme lieu de débarquement l’île de Monte-Cristo, laquelle, étant complètement déserte et n’ayant ni soldats ni douaniers, semble avoir été placée au milieu de la mer du temps de l’Olympe païen par Mercure, ce dieu des commerçants et des voleurs, classes que nous avons faites séparées, sinon distinctes, et que l’antiquité, à ce qu’il paraît, rangeait dans la même catégorie.

À ce nom de Monte-Cristo, Dantès tressaillit de joie : il se leva pour cacher son émotion et fit un tour dans la taverne enfumée où tous les idiomes du monde connu venaient se fondre dans la langue franque.

Lorsqu’il se rapprocha des deux interlocuteurs, il était décidé que l’on relâcherait à Monte-Cristo et que l’on partirait pour cette expédition dès la nuit suivante.

Edmond, consulté, fut d’avis que l’île offrait toutes les sécurités possibles, et que les grandes entreprises pour réussir avaient besoin d’être menées vite.

Rien ne fut donc changé au programme arrêté. Il fut convenu que l’on appareillerait le lendemain soir, et que l’on tâcherait, la mer étant belle et le vent favorable, de se trouver le surlendemain soir dans les eaux de l’île neutre.