Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/296

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celle-là, et je ne désespère pas de vous voir membre de l’Académie des Inscriptions et Belles-Lettres.

Sans doute Albert allait discuter sérieusement ses droits au fauteuil académique, mais on vint annoncer aux deux jeunes gens qu’ils étaient servis. Or, l’amour chez Albert n’était nullement contraire à l’appétit. Il s’empressa donc, ainsi que son ami, de se mettre à table, quitte à reprendre la discussion après le dîner.

Après le dîner, on annonça le comte de Monte-Cristo. Depuis deux jours les jeunes gens ne l’avaient pas aperçu. Une affaire, avait dit maître Pastrini, l’avait appelé à Civita-Vecchia. Il était parti la veille au soir, et se trouvait de retour depuis une heure seulement.

Le comte fut charmant ; soit qu’il s’observât, soit que l’occasion n’éveillât point chez lui les fibres acrimonieuses que certaines circonstances avaient déjà fait résonner deux ou trois fois dans ses amères paroles, il fut à peu près comme tout le monde. Cet homme était pour Franz une véritable énigme. Le comte ne pouvait douter que le jeune voyageur ne l’eût reconnu ; et cependant, pas une seule parole depuis leur nouvelle rencontre ne semblait indiquer dans sa bouche qu’il se rappelât l’avoir vu ailleurs. De son côté, quelque envie qu’eût Franz de faire allusion à leur première entrevue, la crainte d’être désagréable à un homme qui l’avait comblé, lui et son ami, de prévenances, le retenait ; il continua donc de rester sur la même réserve que lui.

Il avait appris que les deux amis avaient voulu faire prendre une loge dans le théâtre Argentina, et qu’on leur avait répondu que tout était loué.

En conséquence, il leur apportait la clef de la sienne : du moins c’était le motif apparent de sa visite.

Franz et Albert firent quelques difficultés, alléguant la