Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 2.djvu/91

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Et l’Anglais tira de sa poche une liasse de billets de banque qui pouvait faire le double de la somme que M. de Boville craignait de perdre.

Un éclair de joie passa sur le visage de M. de Boville ; mais cependant il fit un effort sur lui-même et dit :

— Monsieur, je dois vous prévenir que, selon toute probabilité, vous n’aurez pas six du cent de cette somme.

— Cela ne me regarde pas, répondit l’Anglais ; cela regarde la maison Thomson et French, au nom de laquelle j’agis. Peut-être a-t-elle intérêt à hâter la ruine d’une maison rivale. Mais ce que je sais, Monsieur, c’est que je suis prêt à vous compter cette somme contre le transport que vous m’en ferez ; seulement je demanderai un droit de courtage.

— Comment, Monsieur, c’est trop juste ! s’écria M. de Boville. La commission est ordinairement de un et demi : voulez-vous deux ? voulez-vous trois ? voulez-vous cinq ? voulez-vous plus, enfin ? Parlez !

— Monsieur, reprit l’Anglais en riant, je suis comme ma maison, je ne fais pas de ces sortes d’affaires ; non : mon droit de courtage est de tout autre nature.

— Parlez donc, Monsieur, je vous écoute.

— Vous êtes inspecteur des prisons ?

— Depuis plus de quatorze ans.

— Vous tenez des registres d’entrée et de sortie ?

— Sans doute.

— À ces registres doivent être jointes des notes relatives aux prisonniers ?

— Chaque prisonnier a son dossier.

— Eh bien, Monsieur, j’ai été élevé à Rome par un pauvre diable d’abbé qui a disparu tout à coup. J’ai appris, depuis, qu’il avait été détenu au château d’If, et je voudrais avoir quelques détails sur sa mort.