Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 3.djvu/140

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

La voiture reprit le chemin de Paris.

Le soir même, à son arrivée à la maison des Champs-Élysées, le comte de Monte-Cristo visita toute l’habitation comme eût pu le faire un homme familiarisé avec elle depuis de longues années ; pas une seule fois, quoiqu’il marchât le premier, il n’ouvrit une porte pour une autre, et ne prit un escalier ou un corridor qui ne le conduisît pas directement où il comptait aller. Ali l’accompagnait dans cette revue nocturne. Le comte donna à Bertuccio plusieurs ordres pour l’embellissement ou la distribution nouvelle du logis, et tirant sa montre, il dit au Nubien attentif :

— Il est onze heures et demie, Haydée ne peut tarder à arriver. A-t-on prévenu les femmes françaises ?

Ali étendit la main vers l’appartement destiné à la belle Grecque, et qui était tellement isolé qu’en cachant la porte derrière une tapisserie on pouvait visiter toute la maison sans se douter qu’il y eût là un salon et deux chambres habités ; Ali, disons-nous donc, étendit la main vers l’appartement, montra le nombre trois avec les doigts de sa main gauche, et sur cette même main, mise à plat, appuyant sa tête, ferma les yeux en guise de sommeil.

— Ah ! fit Monte-Cristo, habitué à ce langage, elles sont trois qui attendent dans la chambre à coucher, n’est-ce pas ?

— Oui, fit Ali en agitant la tête de haut en bas.

— Madame sera fatiguée ce soir, continua Monte-Cristo, et sans doute elle voudra dormir ; qu’on ne la fasse pas parler : les suivantes françaises doivent seulement saluer leur nouvelle maîtresse et se retirer ; vous veillerez à ce que la suivante grecque ne communique pas avec les suivantes françaises.