Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/176

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— Tenez ! il cause politique là-bas dans ce petit groupe de grandes célébrités.

— En vérité, dit Monte-Cristo, ces messieurs que je vois là-bas sont des célébrités ? je ne m’en serais pas douté ! Et de quel genre ? Il y a des célébrités de toute espèce, comme vous savez.

— Il y a d’abord un savant, ce grand monsieur sec ; il a découvert dans la campagne de Rome une espèce de lézard qui a une vertèbre de plus que les autres, et il est revenu faire part à l’Institut de cette découverte. La chose a été longtemps contestée : mais enfin force est restée au grand monsieur sec. La vertèbre avait fait beaucoup de bruit dans le monde savant ; le grand monsieur sec n’était que chevalier de la Légion d’honneur, on l’a nommé officier.

— À la bonne heure ! dit Monte-Cristo, voilà une croix qui me paraît sagement donnée ; alors, s’il trouve une seconde vertèbre, on le fera commandeur ?

— C’est probable, dit Morcerf.

— Et cet autre qui a eu la singulière idée de s’affubler d’un habit bleu brodé de vert, quel peut-il être ?

— Ce n’est pas lui qui a eu l’idée de s’affubler de cet habit ; c’est la République, laquelle, comme vous le savez, était un peu artiste, et qui, voulant donner un uniforme aux académiciens, a prié David de leur dessiner un habit.

— Ah ! vraiment, dit Monte-Cristo ; ainsi ce monsieur est académicien ?

— Depuis huit jours il fait partie de la docte assemblée.

— Et quel est son mérite, sa spécialité ?

— Sa spécialité ? Je crois qu’il enfonce des épingles dans la tête des lapins, qu’il fait manger de la garance