Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 4.djvu/219

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à Valentine, et son secret resta au fond de son cœur.

Le jeune homme relut vingt fois dans la journée la lettre de Valentine. C’était la première fois qu’elle lui écrivait, et à quelle occasion ! À chaque fois qu’il relisait cette lettre, Maximilien se renouvelait à lui-même le serment de rendre Valentine heureuse. En effet, quelle autorité n’a pas la jeune fille qui prend une résolution si courageuse ; quel dévouement ne mérite-t-elle pas de la part de celui à qui elle a tout sacrifié ! Comme elle doit être réellement pour son amant le premier et le plus digne objet de son culte ! C’est à la fois la reine et la femme, et l’on n’a point assez d’une âme pour la remercier et l’aimer.

Morrel songeait avec une agitation inexprimable à ce moment où Valentine arriverait en disant :

— Me voici, Maximilien ; prenez-moi.

Il avait organisé toute cette fuite ; deux échelles avaient été cachées dans la luzerne du clos ; un cabriolet, que devait conduire Maximilien lui-même, attendait ; pas de domestique, pas de lumière ; au détour de la première rue on allumerait des lanternes, car il ne fallait point, par un surcroît de précautions, tomber entre les mains de la police.

De temps en temps des frissonnements passaient par tout le corps de Morrel ; il songeait au moment où, du faîte de ce mur, il protégerait la descente de Valentine, et où il sentirait tremblante et abandonnée dans ses bras, celle dont il n’avait jamais pressé que la main et baisé que le bout du doigt.

Mais quand vint l’après-midi, quand Morrel sentit l’heure s’approcher, il éprouva le besoin d’être seul ; son sang bouillait, les simples questions, la seule voix d’un ami l’eussent irrité ; il se renferma chez lui,