Page:Dumas - Le Comte de Monte-Cristo (1889) Tome 6.djvu/168

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Pour beaucoup de gens, Benedetto était, sinon une victime, du moins une erreur de la justice : on avait vu M. Cavalcanti père à Paris, et l’on s’attendait à le voir de nouveau apparaître pour réclamer son illustre rejeton. Bon nombre de personnes, qui n’avaient jamais entendu parler de la fameuse polonaise avec laquelle il avait débarqué chez le comte de Monte-Cristo, s’étaient senties frappées de l’air digne, de la gentilhommerie et de la science du monde qu’avait montrés le vieux patricien, lequel, il faut le dire, semblait un seigneur parfait toutes les fois qu’il ne parlait point et ne faisait point d’arithmétique.

Quant à l’accusé lui-même, beaucoup de gens se rappelaient l’avoir vu si aimable, si beau, si prodigue, qu’ils aimaient mieux croire à quelque machination de la part d’un ennemi comme on en trouve en ce monde, où les grandes fortunes élèvent les moyens de faire le mal et le bien à la hauteur du merveilleux, et la puissance à la hauteur de l’inouï.

Chacun accourut donc à la séance de la cour d’assises, les uns pour savourer le spectacle, les autres pour le commenter. Dès sept heures du matin, on faisait queue à la grille, et une heure avant l’ouverture de la séance la salle était déjà pleine de privilégiés.

Avant l’entrée de la cour, et même souvent après, une salle d’audience, les jours de grands procès, ressemble fort à un salon où beaucoup de gens se reconnaissent, s’abordent quand ils sont assez près les uns des autres pour ne pas perdre leurs places, se font des signes quand ils sont séparés par un trop grand nombre de populaire, d’avocats et de gendarmes.

Il faisait une de ces magnifiques journées d’automne qui nous dédommagent parfois d’un été absent ou écourté ;