Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/113

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— N’êtes-vous pas Nicolas ?

La figure du marchand se décomposa, on voyait le casque trembler dans sa main.

— Nicolas ? répétait-il.

— Nicolas Truchou, marchand quincaillier, rue de la Cossonnerie.

— Non, non, répliqua le marchand qui sourit et respira en homme quatre fois heureux.

— N’importe, vous avez une bonne figure ; il s’agit donc de m’acheter l’armure complète, cuirasse, brassards et épée.

— Faites attention que c’est commerce défendu, Monsieur.

— Je le sais, votre vendeur vous l’a crié assez haut tout à l’heure.

— Vous avez entendu ?

— Parfaitement ; vous avez même été large en affaire : c’est ce qui m’a donné l’idée de me mettre en relations avec vous ; mais, soyez tranquille, je n’abuserai pas, moi ; je sais ce que c’est que le commerce : j’ai été négociant aussi.

— Ah ! et que vendiez-vous ?

— Ce que je vendais ?

— Oui.

— De la faveur.

— Bon commerce, Monsieur.

— Aussi j’y ai fait fortune, et vous me voyez bourgeois.

— Je vous en fais mon compliment.

— Il en résulte que j’aime mes aises, et que je vends toute ma ferraille parce qu’elle me gêne.

— Je comprends cela.

— Il y a encore là les cuissards ; ah ! et puis les gants.

— Mais je n’ai pas besoin de tout cela.

— Ni moi non plus.

— Je prendrai seulement la cuirasse.

— Vous n’achetez donc que des cuirasses ?