Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/218

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— Eh bien, cette affaire, on peut la remettre. C’est une solliciteuse à revoir, voilà tout.

— Recevez-la donc.

— Non ! non ! cher monsieur Chicot ! quoiqu’elle m’ait envoyé cent bouteilles de vin de Sicile.

— Cent bouteilles de vin de Sicile ?

— Je ne la recevrai pas, quoique ce soit probablement une très-grande dame ; je ne la recevrai pas : je ne veux recevoir que vous, cher monsieur Chicot. Elle voulait devenir ma pénitente, cette grande dame qui envoie les bouteilles de vin de Sicile par centaine ; eh bien, si vous l’exigez, je lui refuserai mes conseils spirituels ; je lui ferai dire de prendre un autre directeur.

— Et vous ferez tout cela ?…

— Pour déjeuner avec vous, cher monsieur Chicot ! pour réparer mes torts envers vous.

— Vos torts viennent de votre féroce orgueil, dom Modeste.

— Je m’humilierai, mon ami.

— De votre indolente paresse.

— Chicot ! Chicot ! à partir de demain, je me mortifie en faisant faire tous les jours l’exercice à mes moines.

— À vos moines, l’exercice ! fit Chicot en ouvrant les yeux ; et quel exercice, celui de la fourchette ?

— Non, celui des armes.

— L’exercice des armes ?

— Oui, et cependant c’est fatigant de commander.

— Vous, commander l’exercice aux jacobins ?

— Je vais le commander du moins.

— À partir de demain ?

— À partir d’aujourd’hui, si vous l’exigez.

— Et qui donc a eu cette idée de faire faire l’exercice à des frocards ?

— Moi, à ce qu’il paraît, dit Gorenflot.

— Vous ? impossible !