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— Il m’a compris, dit Gorenflot ; il est on ne peut plus intelligent.

Les moines exécutèrent la course militaire, sorte de manœuvre fort en vogue à cette époque, les passes d’armes, les passes d’épée, les passes de piques et les exercices à feu.

Lorsqu’on en fut à cette dernière épreuve :

— Tu vas voir mon petit Jacques, dit le prieur à Chicot.

— Qu’est-ce que c’est que ton petit Jacques ?

— Un gentil garçon que j’ai voulu attacher à ma personne, parce qu’il a des dehors calmes et une main vigoureuse, et avec tout cela la vivacité du salpêtre.

— Ah ! vraiment ! Et où donc est-il, ce charmant enfant ?

— Attends, attends, je vais te le montrer ; là, tiens, là-bas ; celui qui tient un mousquet à la main et qui s’apprête à tirer le premier.

— Et il tire bien ?

— C’est-à-dire qu’à cent pas le drôle ne manque pas un noble à la rose.

— Voilà un gaillard qui doit vertement servir une messe ; mais attends donc, à ton tour.

— Quoi donc ?

— Mais si !… mais non !

— Tu connais mon petit Jacques ?

— Moi ? pas le moins du monde.

— Mais tu croyais le connaître d’abord ?

— Oui, il me semblait l’avoir vu dans certaine église, un jour, ou plutôt une nuit que j’étais renfermé dans un confessionnel ; mais non, je me trompais, ce n’était pas lui.

Cette fois, nous devons l’avouer, les paroles de Chicot n’étaient pas exactement d’accord avec la vérité. Chicot était trop bon physionomiste, quand il avait vu une figure une fois, pour oublier jamais cette figure.

Pendant qu’il était, sans s’en douter, l’objet de l’attention du prieur et de son ami, le petit Jacques, comme l’ap-