Page:Dumas - Les Quarante-Cinq, 1888, tome 1.djvu/78

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— De bonne humeur, car parfois je l’entends rire tout seul.

— Achète-lui sa maison.

— Qui vous dit qu’elle soit à vendre ?

— Offre-lui-en le double de ce qu’elle vaut.

— Et si la dame m’y voit ?

— Eh bien ?

— Elle disparaîtra encore, tandis qu’en dissimulant ma présence, j’espère qu’un jour ou l’autre je la reverrai.

— Tu la reverras ce soir.

— Moi ?

— Va te camper sous son balcon à huit heures.

— J’y serai comme j’y suis chaque jour, mais sans plus d’espoir que les autres jours.

— À propos ! l’adresse au juste ?

— Entre la porte Bussy et l’hôtel Saint-Denis, presque au coin de la rue des Augustins, à vingt pas d’une grande hôtellerie ayant enseigne : À l’Épée du fier Chevalier.

— Très-bien, à huit heures, ce soir.

— Mais que ferez-vous ?

— Tu le verras, tu l’entendras. En attendant, retourne chez toi, endosse tes plus beaux habits, prends tes plus riches joyaux, verse sur tes cheveux tes plus fines essences ; ce soir tu entres dans la place.

— Dieu vous entende, mon frère !

— Henri, quand Dieu est sourd, le diable ne l’est pas. Je te quitte, ma maîtresse m’attend ; non, je veux dire la maîtresse de M. de Mayenne. Par le pape ! celle-là n’est point une bégueule.

— Mon frère !

— Pardon, beau servant d’amour ; je ne fais aucune comparaison entre ces deux dames, sois-en bien persuadé, quoique, d’après ce que tu me dis, j’aime mieux la mienne, ou plutôt la nôtre. Mais elle m’attend, et je ne veux pas la faire attendre. Adieu, Henri, à ce soir.