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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

ces lignes : « Aussi humain que médiocre, s’il voulait que son pouvoir fût absolu, c’était pour se dispenser de le rendre violent, car il n’y avait en lui rien d’énergique, pas même son fanatisme ; rien de grand, pas même son orgueil. »

Au reste, la précaution qu’avait prise le duc d’Orléans à mon endroit était exagérée.

Le roi ne regarda même pas de mon côté ; il est vrai que je ne cherchai pas le moins du monde à me trouver dans la direction du regard du roi.

J’avais une véritable antipathie pour les Bourbons de la branche aînée, et il a fallu aux morts l’histoire, aux vivants l’exil, pour que je leur rendisse plus tard la justice qui leur est due.

Le roi, le dauphin, la dauphine et la duchesse de Berry arrivés, la fête commença.

M. de Salvandy a raconté, à propos de cette fête, toute sa conversation avec le duc d’Orléans, conversation commençant par ces mots, qui firent la fortune politique de l’auteur d’Alonzo :

— Monseigneur, c’est une vraie fête napolitaine, car nous dansons sur un volcan…

Et, en effet, le volcan ne tarda point à jeter ses premières flammes.

Elles partirent du Palais-Royal, cratère de 1789, que l’on croyait éteint depuis trente-cinq ans, et qui n’était qu’endormi.

J’étais là, je le vis jaillir, je puis raconter l’éruption : elle se fit sous mes yeux.

J’avais cherché l’air sur la terrasse ; je rêvais à cette étrange coïncidence du hasard qui me faisait, moi, déjà républicain à cette époque, témoin presque obligé de cette fête, donnée par ces Bourbons de France, contre lesquels mon père avait combattu, à ces Bourbons de Naples, qui l’avaient empoisonné, quand, tout à coup, de grands cris retentirent et de grandes lueurs apparurent dans le jardin du Palais-Royal.

Une flamme immense, pareille à celle d’un bûcher, s’éle-