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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

complissement des formes qui donnent à la justice un caractère plus solennel, sont venus accréditer, fortifier cette opinion, que nos intraitables ennemis, toujours aux aguets pour nous désunir, exploitent avec empressement.

De là cette émotion populaire, qui, pour les hommes de bonne foi et les bons citoyens, n’a d’autre cause qu’un véritable malentendu. Je vous le déclare en toute assurance, mes concitoyens, le cours de la justice n’a été ni suspendu ni interrompu, et il ne le sera pas. L’instruction de l’accusation portée contre les anciens ministres continue : ils appartiennent à la loi, et c’est la loi seule qui réglera leurs destinées.

» Les bons citoyens ne peuvent désirer ni demander autre chose, et, cependant, ces cris de mort poussés dans nos rues, sur nos places publiques ; ces provocations, ces placards, que sont-ils, sinon des violences faites à la justice ? Nous voulons pour autrui ce que nous voudrions pour nous-mêmes, c’est-à-dire des juges calmes et impartiaux. Eh bien, quelques hommes égarés ou malveillants menacent les juges avant que le débat soit commencé. Peuple de Paris, tu n’avoues pas ces violences : des accusés sont chose sacrée pour toi ; ils sont placés sous la sauvegarde de la loi ; les insulter, gêner leur défense, anticiper sur les arrêts de la justice, c’est violer les lois de toute société civilisée ; c’est manquer au premier devoir de toute liberté ; c’est plus qu’un crime : c’est une lâcheté ! Il n’y a pas un citoyen dans cette noble et glorieuse population qui ne sente qu’il est de son honneur et de son devoir d’empêcher un attentat qui souillerait notre révolution. Que justice se fasse ! Mais violence n’est pas justice. Tel est le cri de tous les gens de bien, tel sera le principe de la conduite de vos magistrats. Dans ces graves circonstances, ils comptent sur le concours et l’assistance de tous les vrais patriotes pour assurer force aux mesures prises et affermir l’ordre public. »

La proclamation est peut-être un peu longue, un peu diffuse, un peu filandreuse ; mais, avant d’être préfet de la Seine, ne l’oublions point, Odilon Barrot était avocat.

Néanmoins, au milieu de cet océan de mots, au milieu de