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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS


CLXXXV


Chéron. — Ses derniers compliments à Harel. — Nécrologie de 1830. — Ma visite officielle du premier jour de l’an. — Un costume à effet. — Lisez le Moniteur. — Dissolution de l’artillerie de la garde nationale. — Première représentation de Napoléon Bonaparte. — Delaistre. — Frederick Lemaître.

Au reste, pendant le cours de cette glorieuse année 1830, la mort avait fait récolte de célébrités.

Elle avait commencé par Chéron, l’auteur du Tartufe de mœurs. — Nous apprîmes sa mort d’une singulière façon. Harel avait eu l’idée de reprendre la seule comédie que le brave homme eût faite, et l’avait mise en répétition en même temps que Christine.

On répétait la comédie de Chéron à dix heures du matin, et Christine à midi.

Un matin, Chéron, qui était l’exactitude même, se trouva être en retard. Harel attendit un instant, puis donna l’ordre de passer à la mise en scène de Christine.

Steinberg n’en était pas à son dixième vers, lorsqu’un petit bonhomme d’une douzaine d’années sortit d’une coulisse, et demanda M. Harel.

— Me voici, dit Harel ; qu’y a-t-il ?

— Il y a, répondit le bonhomme, que M. Chéron vous fait bien ses compliments, et vous prévient qu’il ne pourra pas venir à sa répétition ce matin.

— Pourquoi cela, mon ami ? demanda Harel.

— Parce qu’il est mort cette nuit, répondit le bonhomme.

— Ah ! diable ! fit Harel ; en ce cas, tu lui feras tous mes compliments, et tu lui diras que j’irai à son enterrement demain.

Ce fut l’oraison funèbre de l’ancien commissaire du gouvernement près le Théâtre-Français.