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MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

L’abdication, comme la lettre de la veille, était datée de Rambouillet.

Rambouillet n’était qu’à douze lieues de Paris ; Charles X y avait encore autour de lui quatorze mille hommes et trente-huit pièces de canon.

Il avait même mieux que tout cela : il avait les deux lettres du duc d’Orléans.

Charles X ne pouvait rester à Rambouillet ; il fallait, par une combinaison quelconque, forcer Charles X de quitter, non-seulement Rambouillet, mais encore la France.

Cette combinaison, ce n’était pas inquiétant, on la trouverait, et peut-être même était-elle déjà trouvée.

En attendant, le 2 août, le général Mulot fut envoyé à Cherbourg, afin d’y prendre le commandement des quatre départements qui séparent Paris de la Manche ; en attendant, le même jour, M. Dumont-d’Urville reçut ordre de partir pour le Havre en toute hâte, et d’y fréter deux bâtiments de transport.

Dès la veille, à tout hasard, on avait adressé au Courrier français la protestation du duc d’Orléans contre la naissance du duc de Bordeaux. Vous connaissez cette protestation, qui, en 1820, avait fait exiler le duc d’Orléans, et qui mettait en doute la légitimité du jeune prince ? Eh bien, le 1er août, le Courrier français fut invité à lui donner une place dans un de ses plus prochains numéros.

Il ne fit pas attendre la future impatience royale ! Le matin même du 2 août, la protestation avait paru.

Peut-être avait-elle été composée par les mêmes ouvriers qui imprimaient que les d’Orléans étaient Valois et non Bourbons.

C’était donc le 2 que tout cela se passait ; car, le 3, je fus réveillé à la fois par le rappel, qui se battait avec rage dans la rue, et par Delanoue, qui faisait irruption dans ma chambre, un fusil à deux coups à la main.

Un fusil à deux coups était si peu un appendice du costume de Delanoue, que ce fusil à deux coups me frappa plus que tout le reste.