Page:Dumas - Mes mémoires, tome 7.djvu/51

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
48
MÉMOIRES D’ALEX. DUMAS

— Bon ! si vous aviez commencé par me dire cela, je n’aurais pas demandé de répondant.

On amenait la voiture et les chevaux.

Charras ne s’en alla que lorsqu’il vit la voiture et les deux hommes sur la route de Rambouillet.

La tête de colonne apparaissait sur la route de Paris.

En quelques secondes, Charras fut près de Pajol.

— C’est fait, général, dit-il.

— Quoi ?

— J’ai trouvé les espions.

— Où sont-ils ?

— Partis.

— En vérité, mon cher, vous êtes un homme précieux… Eh bien, maintenant, il vous faudrait partir pour le village de Cognières ; c’est probablement là que nous nous arrêterons.

— Où est-ce, Cognières ?

— Ici… voyez…

Et le général lui montra sur la carte la situation du village, à quatre lieues en avant de Rambouillet.

— Bien ! Et qu’y ferai-je, à Cognières ?

— Vous direz au maire qu’il me faut dix mille rations de foin pour ce soir.

— Dix mille rations de foin ? Il ne les trouvera jamais !

— Comment voulez-vous que nous fassions ? Nous avons deux ou trois mille fiacres, douze ou quinze cents cabriolets, des tilburys, des charrettes, le diable et son train !

— Allons, ne vous désespérez pas, à défaut de foin, nous avons autre chose…

— Quoi ? interrompit impatiemment le général.

— Nous avons des avoines sur pied, donc !

— Bon ! s’écria Pajol ; eh bien, sacrebleu ! vous entendez la guerre, vous !… Comment vous appelle-t-on ?

— Charras.

— Je me souviendrai de votre nom, soyez tranquille !… Allez, je compte sur mes dix mille rations comme si je les avais.