Page:Dunant - Un souvenir de Solférino, 1862.djvu/118

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rentes quand les enfants du pays se battent : le sang qui est répandu dans les combats, n’est-il pas le même que celui qui circule dans les veines de toute la nation ! Ce n’est donc pas quelque obstacle de cette espèce qui risquerait d’arrêter la marche d’une telle entreprise. La difficulté n’est point là, mais la question demeure tout entière dans la préparation sérieuse à une œuvre de ce genre, et dans la création même de ces Sociétés[1].

Si les nouveaux et terribles moyens de destruction dont les peuples disposent actuellement, paraissent devoir, à l’avenir, abréger la durée des guerres, il semble que les batailles n’en seront, en revanche, que beaucoup plus meurtrières ; et dans ce siècle où l’imprévu joue un si grand rôle, des guerres ne peuvent-elles pas surgir, d’un côté ou d’un autre, de la manière la plus soudaine ou la plus inattendue ? — N’y a-t-il pas, dans ces considérations seules, des raisons plus que suffisantes pour ne pas se laisser prendre au dépourvu ?

  1. « … Il faut que l’on voie par des exemples aussi palpitants que ceux que vous rapportez, » daignait m’écrire, en date du 19 octobre 1862, l’honorable général Dufour, « ce que la gloire des champs de bataille coûte de tortures et de larmes. On n’est que trop porté à ne voir que le côté brillant d’une guerre, et à fermer les yeux sur ses tristes conséquences… Il est bon, » ajoute l’illustre général en chef de la Confédération Helvétique, « d’attirer l’attention sur cette question humanitaire, et c’est à quoi vos feuilles me semblent éminemment propres. Un examen attentif et profond peut en amener la solution par le concours des philanthropes de tous les pays… »