Page:Dupuis - Abrégé de l’origine de tous les cultes, 1847.djvu/212

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Bacchus se rappelle la ruse dont il a usé pour jouir des faveurs de Nicé, près des bords de l’Astacus. Le hasard conduit aussi dans ces lieux Aura, qui, dévorée par la soif, cherchait une fontaine pour s’y désaltérer. Le dieu saisit cette occasion, et frappant de son thyrse un rocher, il en fait jaillir une source de vin qui coule au milieu des fleurs que font naître les Saisons. Les Zéphirs planent mollement au dessus, et agitent l’air que le rossignol et les autres oiseaux font retentir de leurs concerts harmonieux.

C’est dans ces lieux charmants qu’arrive la jeune Nymphe pour se désaltérer. Elle boit, sans s’en douter, la liqueur délicieuse que Bacchus fait couler pour elle. Sa douceur la charme, et bientôt elle en ressent les étonnants effets. Elle s’aperçoit que ses yeux s’appesantissent, que sa tête tourne, que ses pas chancellent. Elle se couche et s’endort. L’Amour la voit, avertit Bacchus, et revole aussitôt dans l’Olympe, après avoir écrit sur les feuilles du printemps : « Amant, couronne ton ouvrage tandis qu’elle dort. Point de bruit, de peur qu’elle ne s’éveille. »

Bacchus, fidèle à cet avis, s’approche très doucement du lit de gazon où la Nymphe dormait. Il lui ôte son carquois sans qu’elle le sente, et le cache dans la grotte voisine. Il l’enchaîne, et cueille la première fleur de sa virginité. Il laisse un doux baiser sur ses lèvres vermeilles ; il la dégage de ses liens, et rapporte près d’elle son carquois. À peine le dieu s’est éloigné, que la Nymphe sort des bras du sommeil, qui avait si bien servi son