Page:Dupuis - Abrégé de l’origine de tous les cultes, 1847.djvu/372

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n’y ait pas une espèce de folie à prétendre aujourd’hui arracher l’arbre antique des superstitions, à l’ombre duquel presque tous les hommes croient avoir besoin de se reposer. Aussi mon dessein n’est-il pas de le tenter ; car il en est des religions comme de ces maladies dont les pères transmettent les germes à leurs descendants pendant une longue suite de siècles, et contre lesquelles l’art n’offre guère de remèdes. C’est un mal d’autant plus incurable, qu’il nous fait redouter jusqu’aux moyens qui pourraient le guérir. On saurait gré à un homme qui délivrerait pour toujours l’espèce humaine du fléau de la petite vérole : on ne pardonnerait pas à celui qui voudrait la délivrer de celui des religions, qui ont fait infiniment plus de mal à l’humanité, et qui forment une lèpre honteuse qui s’attache à la raison et la flétrit. Quoiqu’il y ait peu d’espoir de guérir notre espèce de ce délire général, il est néanmoins permis au philosophe d’examiner la nature et les caractères de cette épidémie ; et, s’il ne peut se flatter d’en préserver la grande masse des hommes, il s’estimera toujours heureux s’il vient à bout d’y soustraire un petit nombre de sages ou d’esprits judicieux.

Ce serait combattre les religions avec trop d’avantage, que de rassembler dans un même ouvrage tous les crimes et toutes les superstitions dont les prêtres les ont environnées chez tous les peuples et dans tous les siècles. Une histoire philosophique des cultes et des cérémonies religieuses, et de l’empire des prêtres dans les différentes sociétés, serait le tableau