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XXVIII


Mes pleurs qui sur mon teint distilez si souvent,
Pensant caver le cœur de ma fière inhumaine,
Il vous faut mettre au rang de ces eaux d’Eurimène
Qui changent en rochers ceux qu’elles vont lavant.

Vous empierrez son cœur que je vais poursuivant,
Vainement je luy dis mon amour et ma peine,
Elle oyt tout sans l’oüyr comme une idole vaine,
Et laisse aller mes vœux sur les aisles du vent.

Hélas ! si vous avez ceste vertu cruelle,
Pourquoy ne l’avez-vous pour moy comme pour elle ?
Que ne m’empierrez-vous en coulant dessus moy ?

Mes pleurs, changez mon cœur, si c’est chose possible,
Et comme ma belle est insensible à ma foy,
Faictes que je devienne à ses feux insensible.