Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/173

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Il la regarda d’un air singulier.

— La pauvre femme ! dit-il avec un enthousiasme attendri, ce qui surprit beaucoup Mlle Guay.

Françoise exprima à Charlotte son état d’esprit quelque temps après.

— Je ne sais ce que j’ai, lui dit-elle, je ne puis pas me dire heureuse. Je ne crois pas qu’il soit heureux. Est-ce donc fatal ? Une femme doit se perdre, ou bien ne jamais laisser se glisser dans son cœur la pensée d’aucun homme.

— Ah ! répondit Mlle Guay, tu ne seras jamais tranquille. Quel mot terrible ! Je vous vois l’air si heureux parfois, cependant.

— Je ne puis continuer à vivre ainsi. Il me faut un changement. Ma poitrine éclate. À ma place, que ferais-tu ? Te donnerais-tu ?

— Pourquoi vous imposer tant de sacrifices, en effet. Que craindre ? Vous mourrez à la peine, répliqua Charlotte avec un sourire.

— Comment font-elles toutes pour porter légèrement des pensées si poignantes ? Faut-il que je cesse de me combattre moi-même ? Nous ne pouvons pas parler avec lui comme nous voudrions, nous ne pouvons pas nous dire que nous nous aimons. Il y a une part de nous-mêmes qui nous échappe.

— Oh ! répondit Charlotte, tu as raison. Pourquoi ne suis-tu pas la voix de ton cœur ?

— Non, Charlotte, s’écria vivement Françoise, si c’étaient des sophismes ! Pourquoi ne voulons-nous pas être heureux par la possession de nos âmes ? Tout