Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/222

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prompt parti, quitter cet hôtel, vendre les chevaux et le mobilier. Il nous reste douze à quinze mille livres de rentes au plus.

— Oui, dit Joachim du coin des dents.

— Nous nous contenterons d’une cuisinière…

— Oui, dit-il encore sourdement. Elle évoquait le spectre de la médiocrité qui, à N…, avait fait horreur à M. du Quesnoy.

Il disait oui pour la flatter ou la séduire, mais il était révolté.

— Vous aurez de nouveaux amis, des hommes d’un esprit élevé…

En vérité, elle pensait encore aux hautes leçons qu’Allart donnerait à Joachim. Celui-ci était un vaincu dont on pouvait disposer à son gré.

Joachim ressaisit un ton doux et insinuant :

— Voyons, ma chère Françoise, n’allons pas si vite, raisonnons. Nous pouvons garder au moins l’hôtel pendant six mois. Ne nous pressons pas tant d’exciter la pitié des gens qui nous connaissent. On nous dédaignera, on ne nous verra plus, nous serons enterrés. C’est un suicide. On me considérera comme n’étant plus bon à rien. Si l’on doit tomber, il faut tomber lentement. Restons sur la brèche. J’ai l’espoir qu’on ne s’apercevra pas même d’une éclipse momentanée. Il me faudrait si peu de chose pour rétablir ma position, pour arriver à vous restituer promptement ce que vous me donnez avec tant de générosité. Oui, si peu de chose, cinquante mille francs…

Il se repentit aussitôt d’avoir prononcé ce chiffre en