Page:Duranty - Les Combats de Françoise du Quesnoy.djvu/241

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Il semblait que la baronne reniât tous ses fameux principes d’ordre, de conservation. C’était la preuve d’un enthousiasme sans bornes. Joachim était l’enfant de son choix. Elle se dédommageait de l’affection obligatoire qu’elle avait dû avoir pour ses propres filles, qui n’avaient jamais été selon son cœur. Elle promit d’appuyer de toutes ses forces l’affaire Popeland. Enfin elle fit une chose monstrueuse : elle alla à son secrétaire, y prit six billets de mille francs et les donna à Joachim.

— Tenez, mon cher enfant, n’en dites rien à Françoise. Je ne puis pas faire plus, car je dois ma fortune à mes filles et je ne me suis jamais départie d’aucun devoir.

Mme Guyons avait toujours rêvé d’avoir un fils et fait les plus beaux plans philosophiques pour l’éducation d’un homme. Les succès de Joachim à N… l’avaient ensorcelée.

Pourtant, les bontés faites, elle le chapitra.

— Il ne faut pas échouer deux fois de suite, dit-elle, la première on peut s’en prendre à la destinée~ mais la seconde on s’en prend à l’homme. La première catastrophe est un degré d’expérience, la seconde est un degré d’irréflexion. Défiez-vous des passions. Elles sont dans la jeunesse des pionniers qui ouvrent les sentiers : dans l’âge mûr elles ne savent plus nous conduire qu’aux précipices.

Joachim écouta les sentences avec une parfaite bonne humeur, les relevant d’une petite pointe d’assaisonnement :