Page:Durkheim - Les Formes élémentaires de la vie religieuse.djvu/636

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ment, ce n’est pas simplement isoler et grouper ensemble les caractères communs à un certain nombre d’objets ; c’est subsumer le variable sous le permanent, l’individuel sous le social. Et puisque la pensée logique commence avec le concept, il suit qu’elle a toujours existé ; il n’y a pas eu de période historique pendant laquelle les hommes auraient vécu, d’une manière chronique, dans la confusion et la contradiction. Certes, on ne saurait trop insister sur les caractères différentiels que présente la logique aux divers moments de l’histoire ; elle évolue comme les sociétés elles-mêmes. Mais si réelles que soient les différences, elles ne doivent pas faire méconnaître les similitudes qui ne sont pas moins essentielles.

IV

Nous pouvons maintenant aborder une dernière question que posait déjà notre introduction[1] et qui est restée comme sous-entendue dans toute la suite de cet ouvrage. Nous avons vu que certaines, tout au moins, des catégories, sont choses sociales. Il s’agit de savoir d’où leur vient ce caractère.

Sans doute, puisqu’elles sont elles-mêmes des concepts, on comprend sans peine qu’elles soient l’œuvre de la collectivité. Il n’est même pas de concepts qui présentent au même degré les signes auxquels se reconnaît une représentation collective. En effet, leur stabilité et leur impersonnalité sont telles qu’elles ont souvent passé pour être absolument universelles et immuables. D’ailleurs, comme elles expriment les conditions fondamentales de l’entente entre les esprits, il paraît évident qu’elles n’ont pu être élaborées que par la société.

Mais, en ce qui les concerne, le problème est plus com-

  1. V. plus haut, p. 26.